Pour sa 19e édition, la Nuit des Musées réunit 41 institutions culturelles et lieux d’expositions à travers le canton. Samedi 9 novembre 2024, profitez d’une ambiance automnale festive...
Léa Marie d'Avigneau, conseillère patrimoine culturel au sein du Service de la culture de l'Etat du Valais, nous livre son éclairage sur le patrimoine valaisan
"Depuis trois ans, je visite beaucoup d’institutions patrimoniales valaisannes dans le cadre de ma fonction de conseillère patrimoine culturel ainsi que par intérêt. Les collections qui m’ont jusqu’à présent le plus marquée sont celles liées au récent passé agro-pastoral du canton, de la Suisse. Au contact de ces objets conservés dans beaucoup de musées et inventoriés entre autres sur l’excellent site web de l’association valaisanne des musées, j’ai développé une grande admiration pour les pratiques d’autrefois dont ils étaient le témoin."
"Registres de droits d’eau, draps en chanvre et vans à grains rendent compte d’une société économe en ressources, fonctionnant avec des énergies renouvelables ainsi que des matières premières produites localement et rythmée sur l’environnement naturel, les saisons. Ce patrimoine mobilier du quotidien touche aussi ma sensibilité esthétique : une grande beauté se dégage par exemple des motifs d’une marque à fromage gravée sur bois exposée cet été au Musée de Bagnes. En forme de demi-cercle, il suffit ingénieusement de la tamponner deux fois.
Nos ancêtres avaient-ils le souci du respect de la nature et de l’environnement ? La plupart d’entre eux aurait certainement préféré troquer mulet contre tracteur pendant les foins ainsi qu’avaler un comprimé d’ibuprofène plutôt qu’une infusion de plantes amères pour soulager des maux de tête. Toujours est-il que leurs comportements peuvent certainement nous fournir des modèles d’inspiration intéressants pour faire face aux crises climatique et sociale actuelles."
"Plusieurs passionné.e.s se sont déjà donné pour mission de réactiver ou transmettre certains savoir-faire ancestraux pertinents pour nos défis contemporains, telle l’association Erlebniswelt Roggen Erschmatt. Celle-ci, qui conserve et cultive des anciennes variétés de seigle, a le projet de planter des spécimens oubliés de légumineuses valaisannes en combinaison avec du blé d’origine également locale. Jusqu’aux débuts de l’agriculture intensive, fèves et pois séchés étaient souvent produits et consommés dans les Alpes, intelligemment associés aux céréales (notamment dans le pain de seigle), qui contiennent des acides aminés complémentaires. Ces protéines végétales constituaient un apport essentiel à la survie des populations à une époque où la viande était rarement au menu. Alors que la réduction de nos apports carnés s’annonce comme l’une des mesures majeures de la réduction de notre empreinte carbone, cette démarche me parait porteuse."
"Plusieurs herboristes et producteurs, comme l’Essencier, à Icogne, mettent aussi au goût du jour le patrimoine immatériel de la cueillette et de la culture des plantes sauvages, reconnu sur les listes cantonale et nationale des traditions vivantes. Avant l’industrialisation des médicaments, l’« agrou » (ou impératoire), le millepertuis et nombre d’autres végétaux étaient ramassés et connus de toutes et tous ou presque pour leurs vertus médicinales et gustatives. A l’heure où le secteur pharmaceutique est l’un des plus grands pollueurs de la planète et où la surmédicalisation présente des risques sanitaires certains, la connaissance de traitements naturels, souvent sans ou avec peu d’effets secondaires, en complément de la médecine allopathique, sont certainement des voies à suivre."
Autrice
Léa Marie d'Avigneau, conseillère patrimoine culturel au Service de la culture de l'Etat du Valais
Agenda
culturel